LE TERMINUS FERROVIAIRE À BEAUCEVILLE (1886-1907)

Le promoteur du Levis and Kennebec Railway est Louis-Napoléon Larochelle de Saint-Anselme. L’inauguration du tronçon Lévis à Scott a lieu en 1875. En 1876, la voie ferrée stoppe à deux milles au nord de Saint-Joseph-de-Beauce. Pour diverses raisons, Larochelle déclare faillite en 1881. Le Quebec Central Railway de Sherbrooke s’en porte alors acquéreur. En 1886, les wagons se rendent enfin à Saint-François-de-Beauce, où le premier chef de gare est François-Xavier Rancourt.

Pendant ce temps, le notaire et sénateur Joseph Bolduc (1847-1924) fait des pressions politiques pour que le QCR travaille davantage la ligne ferroviaire du haut des coteaux, soit de Tring-Jonction au Lac-Mégantic…en passant par son village de Saint-Victor. M. Bolduc aide en cela Beauceville qui sera officiellement le terminus de la vallée de la Chaudière pendant vingt et un ans. En 1908, le tracé Saint-Joseph-Beauceville est éloigné de la Chaudière, toujours menaçante.

En 1900, lors de la construction de l’église actuelle de Saint-Georges, Basile Deblois vient chercher à Saint-François les pierres de Deschambault arrivées par train. Enfin, en 1907, le train débouche à Saint-Georges. Le 12 décembre 1907, le Village de Saint-Georges-Est se sépare de Saint-Georges d’Aubert-Gallion. En 1906, le futur homme d’affaires Édouard Lacroix (1889-1963) travaille comme télégraphiste à la gare de Disraéli. À Saint-Georges-de-Beauce, Joseph-Alphonse Gendron(1885-1968) est le premier chef de gare.

Au lieu de se rendre à Moose River Maine, le train bifurque de Saint-Georges vers les chantiers de l’arrière-pays de Sainte-Justine en 1909 et du Lac Frontière en 1915. Ouvert en 1917, le pont de Québec voit le train du QCR traverser le Saint-Laurent en octobre 1921 jusqu’à la gare du Palais.

Relisons un extrait du Circuit patrimonial de Beauceville phase I : «En face de la rivière du Moulin, sur la rive Est de la rivière Chaudière, la vie s’organise aussi. Bâti en 1848, l’Hôtel de Dominique Hamel (Hôtel Lambert) sera, à partir de 1856, le siège social du Bureau d’enregistrement de Beauce, au coin de l’actuelle 107e Rue (de la Station) et du boulevard Renault. Érigé civilement depuis 1850, Saint-François-de-la-Beauce tient ses séances du conseil municipal et de conseil de comté dans ce Bureau de la publicité des droits. (…) En 1886, on n’emprunte qu’un seul tracé dans l’Est, soit la 1re Avenue. Bientôt la (107e) rue du Dépôt gravit la pente jusqu’à la gare, favorable au commerce.

Dans l’Est, cet arrondissement de Léry se blottit en aval des Rapides du Diable et à l’orée du Bois des Amoureux. De 1908 à 1969, la rue de la Station sera le site de l’imprimerie et du journal L’Éclaireur. En haut de cette 107e Rue, des postes de transformation électrique seront en opération à partir de 1909.» L’ouverture de la 2e dans ce premier quartier industriel beaucevillois. avenue Est sera tracée en 1908.

Donc, si Beauceville fut la métropole de la Beauce (1875-1930), c’est dû en bonne partie au terminus ferroviaire. Vers 1900, il y eut une centrale électrique sur la 107e rue bien avant l’actuel petit poste d’Hydro, attiré sans doute par le train. De plus, combien de commerces et d’industries se situeront le long de la voie ferrée pour faciliter le transport de leurs marchandises. Les souvenirs se bousculent en vrac: en 1901, le jeune orphelin de dix ans, Gustave Binet (1891-1988) à Pierre de Saint-François-de-Beauce travaille à la construction de la voie ferrée en bas des Rapides du Diable. Il reçoit une piastre pour onze heures par jour. Aussi, vers 1915, le train ralentissait à la hauteur de la Punaise et ramassait avec un crochet la poste attachée dans un sac juché sur un poteau. À cette même époque, les jeunes Beaucevillois se réjouissent de voir arriver un gros cirque américain via les chars sur la track. Clin d’œil à Cléophas Veilleux (1888-1975), employé du Quebec Central Railway de 1918 à 1963.

Joseph Garant (04-07-1868 Saint-Éphrem / 15-09-1884 Saint-François-de-Beauce. Inhumé à Saint-Éphrem. ) journalier pour le chemin de fer Quebec Central, fils de Jacques Garant et de Apolline Gosselin de Saint-Éphrem-de-Tring est décédé accidentellement à Saint-François-de-Beauce, enseveli sous un éboulis de terre. Il était âgé de 16 ans et 2 mois. Il est le frère de l’arrière-grand-père d’André Garant, Polycarpe Garant (1859-1925).

Il y eut une époque où les gens de Saint-Georges, et de la Beauce en général, venaient chercher leurs marchandises à Saint-François. Paraît-il que Thomas Edison (1847-1931) coucha à l’Hôtel Beau-Rivage, au bas de la Côte de la Station de Beauceville. En juin 1939, le roi Georges VI et son épouse prennent le train et stoppent à Sainte-Marie-de-Beauce, laissant plus de 1500 visiteurs poiroter sur les quais de la gare de Vallée-Jonction. Vers 1955, que dire de ces folles randonnées en train au Colisée de Québec pour assister aux séries éliminatoires de hockey de la Ligue de Beauce? En 1957, la drague de Saint-Simon-les-Mines de Séraphin Bolduc arrive en pièces détachées via la voie ferrée.

Le crissement des freins de la locomotive en attirait plus d’un à la gare de Beauceville, à une époque où les nouvelles se faisaient rares…La gare est démolie depuis 1969.

En janvier et février 2010, Michel M Mercier et son équipe du Comité Culturel et Patrimonial de Beauceville organisent une intéressante exposition sur la gare de Beauceville.

Louise Giguère et Lucien Coté, les concepteurs de la maquette de la gare de Beauceville

Photo: L'Éclaireur-Progrès

André Garant

Sources: Histoire de Sainte-Marie, tome ll, Honorius Provost, 1970

L'Histoire du train en Chaudière-Appalaches, Synex,2001

Photos :Fonds Omer Dancose et Marthe Vaillancourt